Startup et Coloriage
Et si au lieu de colorier, on se mettait à dessiner ?
Si il y a bien une chose qui est très à la mode en ce moment, ce sont les startups. On en voit bourgeonner de tous côtés, et c’est très bien. J’ai moi-même participé à un Startup Weekend. Pour ceux qui ne voient pas du tout de quoi je parle, allez voir sur http://startupweekend.org
Il s’agit d’une expérience à vivre au moins une fois et c’est très instructif. L’ambiance était très chouette, on se rend aussi compte qu’on n’a plus vingt ans, mais ce n’est pas le sujet. Je vous parlais donc de livre de coloriage…
Est-ce que Angry Birds aide à gérer sa phobie du cochon?
Durant ce weekend, plusieurs « coachs » sont passés nous dire bonjour et nous conseiller. Et la première question qu’on a entendu chaque fois qu’un coach entrait dans notre salle était : Alors? Quelle solution à quel problème apporte votre startup ?
Pour nous, cette question était un peu bizarre puisqu’il s’agissait un jeu pour mobile. La réponse fut sans appel : Est-ce que Candy Crush aide à résoudre les troubles alimentaires des anorexiques? Et est-ce qu’Angry Birds aide à gérer sa phobie du cochon? Halala… On a ri avec ça au bureau… Bref.
Venons-en au fait de cet article. Cette aventure m’a fait prendre conscience d’un fait troublant. On a une furieuse tendance à comparer les startups à des livres de coloriage. Je m’explique. Prenez un livre de coloriage. Il y a, quelque part dans le monde, une personne qui a dessiné le personnage que vous voyez, qui en a imaginé les traits. Et son éditeur s’est dit « super, c’est très joli, on emballe, les gosses vont adorer »
Et de notre côté, on regarde l’air cul-cul le résultat de nos charmants bambins. Certains étant moins familier que d’autres avec le concept du « on ne dépasse pas ». Mais soit. In fine, on leur donne un canevas et les enfants s’éclatent dedans. J’ai même déjà vu des concours où l’on expose les meilleurs dessins de ces Picasso en herbe sous le regard béat de leurs parents. Et au final, à bien regarder, à part la différence de couleurs, il est très rare de tomber sur LA perle.
Quel rapport avec les startups me direz-vous? J’y viens.
On pourrait comparer les startups qui ont vraiment réussi à une oeuvre d’art. Les plus belles oeuvres d’art sont partie d’une feuille blanche. Pas d’un livre de coloriage. Et nos charmant bambins (bon, d’accord, ils ne sont pas tous charmant) n’ont jamais été aussi créatif que lorsqu’ils reçoivent leurs crayons et une simple feuille de papier. Si, c’est de l’art. Parfois très abstrait j’en conviens. Et pourtant… Lego l’a très bien compris. La preuve :
Parce qu’on veut tous être le prochain tueur de Facebook
Lorsque vous décidez de lancer votre startup, les « coachs » vous expliquent comment fonctionnent les autres startups qui ont du succès. Appelons-les les « Big Players ». Ils vous mettent le modèle sous le nez, et le but, pour vous, est de vous en inspirer et surtout de vérifier que votre startup répond bien à tous les critères utilisés par ces fameuses startups à succès. Et si vous leur posez la question, ils vous répondront le plus naturellement du monde que ça marche puisqu’elles ont fait comme ça. Et comme nous rêvons tous de devenir millionaire rapidement et de voir notre petite entreprise en une des magazines financiers en vous présentant comme le nouveau prodige, vous foncez tête baissée. Rassurez-vous, je ne vous en veux pas. C’est alors que fier du résultat, et après avoir adapté votre produit une bonne vingtaine de fois, vous vous lancez dans la vie trépidante des jeunes entrepreneurs. Même si votre résultat final ne correspond plus trop à votre idée initiale. Mais comme l’a si bien dit votre coach, vous n’avez pas pensé à tout. Et c’est normal, vous débutez. Vous voilà donc confiant, et bien décidé à devenir le prochain Mark Zuckerberg. Et comme le dit si bien cette émission de télévision dont je ne me souviens plus du nom : Et là, c’est le drame !
Pourquoi? Pour une raison très simple. C’est qu’à force de vouloir ressembler à ces grands qui ont réussi, vous vous mettez dans leur ombre, et personne ne fait attention à vous. Votre erreur a été en fait de vous focaliser sur le comment, plutôt que le pourquoi.
Vous avez lu tous ces bouquins sur Steve Jobs, et connaissez par coeur sa technique pour être un le visionnaire de demain. Vous avez bien lu tous les livres sur les « lean startups », sur le business model canvas. Vous avez étudié en détail le « comment » ils ont fait pour réussir. Et quand vous regardez votre produit, on ne peut rien vous reprocher. Tout concorde.
De fait. Tout est bon. Comme dans le cochon. Tout est juste. Sauf… le « pourquoi ».
Mais pourquoi quoi d’abord ?
Les startups qui ont réussi à s’imposer aujourd’hui comme étant les « Big Players » ont un modèle qui sert aujourd’hui à inspirer grand nombre d’entre nous. Elles sont étudiées dans les grandes écoles et les universités, et jouent parfaitement leur rôle de modèles ou de motivateur.
Tous ces Big Players ont une chose en commun. Ils ne se sont pas contenter de faire pareil que machin, ou de marcher dans les pas de chose. Non. Ils ont eu une idée, et surtout, ils ont profité d’un contexte. Qu’il soit temporel ou économique. Ils ont imaginé un produit à un moment bien précis, à un endroit précis.
Ce qui répond à votre « pourquoi ».
Pourquoi Google a lancé son moteur de recherche tel qu’on le connait aujourd’hui? Parce que celui de Yahoo devenait vraiment compliqué. Et Google a décidé d’apporter une alternative simplifiée à son maximum. Le temps a fait son office, et vous pourriez aujourd’hui essayer de refaire la même chose, selon le même modèle. Vous finiriez dans un endroit fort sympathique : les oubliettes. Car malheureusement, ce qui marchait hier, peut ne pas fonctionner aujourd’hui. Et le contraire est tout aussi vrai. Ce qui paraissait totalement inutile hier peut devenir un « must have » aujourd’hui. Et c’est logique. Car le premier arrivé est souvent celui qui sert de référence. Un peu comme les trilogies Star Wars. Il y a eu l’épisode de 1977, et puis il y a eu les autres…
Mais ça ne veut pas dire que vous ne pouvez pas vous inspirer de ces grands. Je vous conseille d’ailleurs un très bon livre à ce sujet : Steal Like an Artist :: Austin Kleon
Alors pour tous ceux qui veulent lancer leur startup, voici mon conseil :
Bien sûr, votre Business Model Canvas est super important. C’est ce qui va vous aider à tracer votre ligne de conduite et financière. Et il ne faut surtout pas le prendre à la légère. Bien sûr qu’il est important d’apprendre de ces Big Players. Car contrairement à ce qu’on pourrait croire, beaucoup se sont planté avant de réussir. Et ils ont appris de leurs erreurs. Donc, oui, apprenez avec eux. Et surtout, ne prenez pas cette phase à la légère.
Mais voici pour moi quelques point essentiels à ne pas oublier lorsque vous décidez de lancer votre produit:
- La présentation de votre produit. Vous pouvez avoir la truffe la plus chère du monde, si vous la présentez dans du papier journal, elle rappellera à tout le monde ce qu’elle est : de la merde fossilisée. Donc, faites attention à l’emballage. Il s’agit de votre carte de visite et la première accroche auprès de votre public cible.
- La conviction. Si vous n’y croyez pas plus que ça, nous non plus. Et si vous n’y croyez pas, c’est que quelque chose vous chiffonne. Faites-vous confiance. Ca s’appelle l’instinct. C’est votre cerveau qui vous dit que vous avez oublié un truc. Donc, refaites le tour de votre produit.
- Il y aura toujours une cible pour votre produit. Bon, si votre produit est une poupée vaudou à l’effigie de Stalline, vous risquez d’avoir une cible plus réduite que si elle ressemble à Justin Bieber. Mais ça ne veut pas dire que ça ne peut pas marcher. Il va juste falloir la vendre différemment.
- Le contexte. Assurez-vous que c’est le bon moment. Ou que le moment n’est pas déjà passé.
- Acceptez de vous planter. Un échec n’est un échec que si vous n’en faites rien. Vous êtes la somme de votre expérience. Et l’expérience ne s’acquière que quand on se plante. Donc, keep cool.
Bon, et sinon? Vous, c’est quoi votre idée de prochaine startup?